mardi 1 février 1994

36.15 RAVE, par Pierre Rahola

N.B. : Article inachevé pour le moment.

3615 RAVE
Au début des années 90 la vague techno, déjà bien développée en Grande Bretagne et en Europe du nord, arrive en France avec les première Raves, dont certaines, comme "Spasme" qui eu lieu fin 1992 à Paris, marqueront les esprits.
La discothèque "Taptoo", à Epernay est la seule qui programme intégralement de la dance dans la région, la programmation est assez inégale, mais on peut tout de même y voir Laurent Garnier, Jeff Mills et de nombreuses pointures dès 92.

A Reims et ses environs, les premiers ravers locaux cherchèrent à reproduire chez eux l'expérience qu'ils ont vécu ailleurs dans des hangars de la banlieue parisienne ou de la Belgique. L'une des premières soirées, si ce n'est la première soirée techno rémoise, appelée Underachiever a eu lieu en Février 1994 dans une salle polyvalente de la Neuvillette en périphérie de Reims. Pour 70 francs on pouvait danser sur des mixes de Stéphanovitch, l'Iguane et Adolphe,  trois DJ parisiens bien réputés, ainsi que Laurent "Lorenzo" et Skyflyer(?) tous deux Rémois, les tous premiers DJ techno de Reims, de mémoire.
 Le cadre importait peu, seule la propagation d'ondes sonores à un volume élevé dans un endroit relativement isolé comptait, quelques lumières au mieux, mais il n'y avait pas encore tous les attributs "cools" qui composeraient les "soirées techno" de quelques années plus tard, c'était le son et les gens qui faisaient la soirée, la foule se doit d'être compacte.

Si les raves anglaises ou parisiennes étaient gigantesques, à Reims ça ressemblait à une grosse boum improvisée avec que dalle, mais de nombreux ravers locaux confirmeront que c'était sûrement la meilleure formule, ne pas penser trop grand, rester confidentiel. Beaucoup de soirées étaient privées et consistaient à brancher des platines et un système son chez quelqu'un qui a suffisamment d'espace. 
 A l'époque la formule consistait à louer une salle en inventant un bobard pour ne pas affoler le propriétaire, d'ordinaire frileux quand il s'agit d'un nouveau type de musique, d'un nouveau type de soirée. On lui disait que c'était une soirée d'étudiants pharma.
 Il fallait ensuite louer un système sonore, installer des platines et une table de mixage, imprimer un flyer "DIY" et annoncer la soirée sur 3615 Rave, un service minitel qui permettait de trouver des raves dans tout le pays. il y avait aussi le système des "infolines", un numéro de téléphone à appeler pour connaitre le lieu de la soirée. L'infoline était obligatoire et il était assez rare d'indiquer le lieu sur le flyer, hormis pour des soirées "légales".
 Dans les discothèques, les premiers succès techno mainstream comme technotronic ou confetti's faisaient partie des sempiternels "quart d'heure x puis quart d'heure y" qui constituent le bon déroulement d'un soirée en discothèque à la française. Les raves s'étirent sur des heures, jusqu'au matin, et le son y était beaucoup plus cru et brutal que dans les discothèques, d'influence plutôt Anglaise et Nordique, le son électronique à Reims n'a jamais fait dans la dentelle. La "sécu" n'était pas encore très importante puisqu'à part quelques initiés, ça n'intéressait pas grand monde. On n'allait pas dans une rave pour écouter des morceaux connus, bien au contraire.
Les habitants d'Epernay étaient un peu plus chanceux d'avoir vu passer quelques légendes, mais le Taptoo est vite devenu l'archétype de la boîte techno belge/eurodance qui s'est répandu dans toute l'Europe.

L'histoire pourrait continuer à être racontée en faisant abstraction des stupéfiants, mais soyons honnêtes, cela faisait partie de cette culture, et la confidentialité des soirées était en partie due à ceci. On avait laissé une génération se faire des piquouzes dans la cathédrale en écoutant Tangerine Dream et une discothèque au nom d'animal fut à une certaine période un temple de la dope, il était hors de question que ça se reproduise, plus jamais ça. Il n'est pas bon d'aimer l'ecstasy et le cannabis au pays des ivrognes, surtout dans un sanctuaire comme la Champagne. Cela dit, l'organisation de Raves n'avait pas pour unique but de consommer et revendre des substances, et une bonne partie du public se contentait de la bière et de la musique(et peut-être quelques pétards).

Alors que les soirées du même type se reproduisent assez ponctuellement, le style musical se diversifie, certaines soirées regroupent des styles plus variés comme la soirée "Velvet Vibez", qui accueillit à la fois General Good&Pirzu pour un set Jungle, suivi de Péa (futur Yuksek) qui jouait à l'époque de la tech/house, puis Furious et Emergenza, des collectifs parisiens plutôt portés sur la techno Hardcore, proche du son qui allait devenir plus tard le standard des"teknivals".
General Good, sélecteur reggae et dancehall, avait rapporté de Londres les premiers disques de Jungle que Pirzu se fit un plaisir de mixer pour l'ouverture de la soirée. A la suite de cette soirée, Général Good décida d'apprendre à mixer ses disques dancehall comme le ferait un dj de hip hop ou d'electro, c'est rare et ça mérite d'être mentionné. Cela lui permettait de composer avec ses disques de manière plus riche qu'une sélection reggae habituelle pour créer une sorte de mégamix, et comme il jouait un son "digital", minimaliste et percutant, il était souvent invité à jouer dans des soirées techno, trance ou drum&bass qui n'était pas forcément son public de départ, mais ça fonctionnait très bien quand même. Après plusieurs années de Djing, General Good va se tourner vers le chant et la performance Reggae Dancehall, ce qu'il fait encore à ce jour.

Péa, au départ plutôt de sensibilité house, va se tourner vers le son trance, joué à l'époque avec des cassettes DAT, il fait partie d'un petit collectif qui organise régulièrement des soirées trance autour de Reims. Puis il commence à se procurer du matériel et former un petit studio avec son ami Laurent, afin de composer leurs propres morceaux. Leur duo s'appelle Yumade, leur succès dans la scène trance va être quasi immédiat et ils jouent régulièrement à l'étranger. Yumade est sûrement le groupe/projet rémois qui a le voyagé le plus loin avant la période "Reims Academy". Ils sortent quelques maxis sur 3Dvision, Shpastic Elastic, Databass. Leur style est assez particulier et ne reprend pas les canons de la musique trance, Yumade est plus rythmique et bruitiste que les productions trance standard.
Ils continuent de participer à l'organisations de soirées dans les alentours, faisant des DJ sets, mais ils ne se sont jamais produits en "live" à Reims.
Laurent décide de ralentir pour se consacrer à sa carrière professionnelle, les heures de studio, le jet-lag et les festivals n'étant pas vraiment compatibles avec un métier plus conventionnel. Péa continue l'aventure seul pour quelque temps, sortant des Maxis sur Databass, son style évolue vers quelque chose de plus minimaliste. Il décide finalement de changer de direction musicale, plus pop, qui évoluera au fil des années en Yuksek, Klanguage et divers autres projets et collaborations.